(Mise à jour le 5 décembre 2017)
Un nouveau nom pour le blogue
La Nouvelle-France en héritage
Nous estimons qu'il faut rappeler la continuité des fondateurs de cet Amérique du Nord qui a poussé en Acadie et sur les rives du Saint-Laurent avec nos identités nouvelles. Pourquoi ? Pour ne pas oublier notre identité néo-française qui en est l'assisse commune.
La Nouvelle-France demeure le seul repère commun des francophones catholiques d'Amérique, il n'y a pas d'autre « appellation » chez les descendants des vaincus qui puisse encore servir de liant dans le sens profond de la transcendance.
Canadiens issus de Nouvelle-France, nous réclamons des Anglo-saxons un statut national depuis plus de deux siècles. Notre histoire est une épopée. Mon blogue s'inscrit dans le noble objectif de retrouver notre nom et de réaffirmer notre identité. Comme nation socio-culturelle et historique, nous voulons une reconnaissance statutaire au Québec et au Canada. Abonnez-vous au blogue pour ne rien manquer. Visitez notre site internet : https://canadiens-francais.com
Dernière parution
L'ambassadeur de Russie au Canada - lettre ouverte de Oleg Stepanov
Le Canada qualifié de Grande Ukraine Pour ceux qui s'intéressent à la situation internationale, l'état des relations entre le Canada...
mardi 5 décembre 2017
samedi 2 décembre 2017
Le trouble identitaire chez les «descendants des vaincus» - annonce
Être issus d'ancêtres qui ont civilisé un continent, qui ont fondé les plus grandes villes américaines, et vivre à la remorque de toutes les minorités en leur propre province, quelle déchéance !
Hermas Bastien
Condition de notre destin national, 1935
(Cité par Christian Saint-Germain)
Il nous faut découvrir la richesse de notre identité nationale par la reconnaissance de ses assises territoriales (territorialité) et continentales (continentalité). Les deux piliers d'une identité plantée dans l'établissement original de la Nouvelle-France en Amérique. Ces référents, territoire et continent, n'ont jamais trouvé la forme de leur architecture politique dans le cadre d'un projet libérateur des « descendants des vaincus ». Dans le monde d'aujourd'hui, ces référents sont pourtant les seuls, conjugués ensemble, qui peuvent rendre compte de la singularité d'un passé d'explorateurs hardis et de fondateurs de pays.
______________
Pour poursuivre sur le même sujet : https://gilles-verrier.blogspot.com/2018/03/trouble-didentite-chez-les-descendants.html
lundi 27 novembre 2017
Une quête perpétuelle d'indépendance sans possibilité de libération
Mis à jour le 28 novembre 2017
En choisissant pour titre de son livre «Égalité ou indépendance», Daniel Johnson avait fort bien vu. À cinquante ans de distance la formule n'a rien perdu de son actualité. Malheureusement son approche confiante, qui interpellait le Canada posément pour lui rappeler que nous sommes du bon coté du droit et de la justice, un rappel que n'aime pas le Canada, n'aura pas connu d'échos durables. Le Canada, qui n'en manque pas une pour se draper d'une fatigante supériorité morale, n'aime pas qu'on lui renvoie la patate chaude en pleine gueule. C'est ce que faisait Johnson avec sa formule lapidaire.
Le Canada ne pouvait apprécier qu'on le mette au défi d'assurer l'égalité promise dès les premières délibérations constitutionnelles de 1864 entre les fondateurs, les « descendants des vaincus »(1); et les occupants venus ensuite, les deuxièmes «fondateurs» et usurpateurs, qui se superposèrent aux premiers.
Si le deuxième Canada, parangon de vertu devant l'éternel, n'aime vraiment pas qu'on le fasse suer, cela tombe bien car les rapports de domination semblent très difficiles à décoder chez les colonisés. C'est donc un « match » parfait ! La politique autonomiste québécoise ne cesse de nous alimenter par de nouvelles illustrations de son caractère inoffensif et domestiqué. La simple exposition des rapports de domination dans le débat public, notamment dans les élections provinciales, est un cas de conscience insurmontable. Faut-il se surprendre que, mis à part Johnson, et quelques figures d'exception dans la bourgade, le dévoilement de cette relation dans toute sa splendeur inégalitaire n'a jamais fait école ? Mettre le Canada au pied du mur, le pousser à la défensive, l'obliger à réagir en l'amenant sur notre terrain, indisposer le colosse aux pieds d'argile n'a jamais été le fort des premiers ministres qui suivirent Johnson, y compris ceux de son propre parti, et pas davantage à ce jour du coté d'Option nationale et du Parti québécois. Me faut-il rajouter Québec solidaire ?
La façon de Johnson était une application de la règle qui veut que la meilleure défense c'est l'attaque. On a vécu tout le contraire. Le slogan du référendum de 1995, «Oui, et ça devient possible» est désarmant de naïveté, mais préparait très bien le catastrophisme de la défaite par son inversion : Non, ça devient impossible. Les maîtres du jeu ne veulent pas. (2)
Et si on se donne la peine de poursuivre avec les slogans électoraux du Parti québécois au fil du temps, il serait difficile pour un observateur étranger parachuté au Québec de s'imaginer que «nous sommes en guerre», pour paraphraser un représentant de la garde zouave du camp fédéral. Voici la liste de nos meilleures saillies « indépendantistes ». Elles ne feraient pas de mal à une mouche, c'est comme si elles avaient été formulées pour être justement inoffensives.
Liste partielle des slogans électoraux du Parti québécois
2014
Liste des slogans électoraux d'Option nationale
2012
ON peut mieux pour le Québec
2014
Oui ou non, entreprendrez-vous un référendum dans le prochain mandat pour un Québec indépendant?
Mais on ne chipotera pas sur la qualité du français d'Option nationale. Allons tout de suite à l'essentiel. Rien ne distingue ON du PQ dans leurs efforts pour maquiller le conflit national qui divise les «descendants des vaincus» et les maîtres du jeu depuis 150 ans. Également sibyllins, se gardant bien d'interpeler les gardiens de la prison constitutionnelle, aucun des slogans présentés aux Québécois par le PQ ou ON ne peut rivaliser avec l'éclairante et simple vérité, celle de Daniel Johnson qui titrait : Égalité ou indépendance.
En choisissant pour titre de son livre «Égalité ou indépendance», Daniel Johnson avait fort bien vu. À cinquante ans de distance la formule n'a rien perdu de son actualité. Malheureusement son approche confiante, qui interpellait le Canada posément pour lui rappeler que nous sommes du bon coté du droit et de la justice, un rappel que n'aime pas le Canada, n'aura pas connu d'échos durables. Le Canada, qui n'en manque pas une pour se draper d'une fatigante supériorité morale, n'aime pas qu'on lui renvoie la patate chaude en pleine gueule. C'est ce que faisait Johnson avec sa formule lapidaire.
Le Canada ne pouvait apprécier qu'on le mette au défi d'assurer l'égalité promise dès les premières délibérations constitutionnelles de 1864 entre les fondateurs, les « descendants des vaincus »(1); et les occupants venus ensuite, les deuxièmes «fondateurs» et usurpateurs, qui se superposèrent aux premiers.
Si le deuxième Canada, parangon de vertu devant l'éternel, n'aime vraiment pas qu'on le fasse suer, cela tombe bien car les rapports de domination semblent très difficiles à décoder chez les colonisés. C'est donc un « match » parfait ! La politique autonomiste québécoise ne cesse de nous alimenter par de nouvelles illustrations de son caractère inoffensif et domestiqué. La simple exposition des rapports de domination dans le débat public, notamment dans les élections provinciales, est un cas de conscience insurmontable. Faut-il se surprendre que, mis à part Johnson, et quelques figures d'exception dans la bourgade, le dévoilement de cette relation dans toute sa splendeur inégalitaire n'a jamais fait école ? Mettre le Canada au pied du mur, le pousser à la défensive, l'obliger à réagir en l'amenant sur notre terrain, indisposer le colosse aux pieds d'argile n'a jamais été le fort des premiers ministres qui suivirent Johnson, y compris ceux de son propre parti, et pas davantage à ce jour du coté d'Option nationale et du Parti québécois. Me faut-il rajouter Québec solidaire ?
La façon de Johnson était une application de la règle qui veut que la meilleure défense c'est l'attaque. On a vécu tout le contraire. Le slogan du référendum de 1995, «Oui, et ça devient possible» est désarmant de naïveté, mais préparait très bien le catastrophisme de la défaite par son inversion : Non, ça devient impossible. Les maîtres du jeu ne veulent pas. (2)
Et si on se donne la peine de poursuivre avec les slogans électoraux du Parti québécois au fil du temps, il serait difficile pour un observateur étranger parachuté au Québec de s'imaginer que «nous sommes en guerre», pour paraphraser un représentant de la garde zouave du camp fédéral. Voici la liste de nos meilleures saillies « indépendantistes ». Elles ne feraient pas de mal à une mouche, c'est comme si elles avaient été formulées pour être justement inoffensives.
Liste partielle des slogans électoraux du Parti québécois
2014
Plus prospère, plus fort, plus indépendant, plus accueillant
2012
À nous de choisir
1998
J'ai confiance
1994
Une autre façon de gouverner
1981
Faut rester forts au Québec
1976
On a besoin d'un vrai gouvernement (On mérite mieux que ça)
À lire ces slogans, qui pourrait croire qu'un conflit national larvé et occasionnellement ouvert traverse ce territoire ? Personne ! Une vérité de l'oppression nationale bien maquillée par les agences publicitaires auxquelles nos PQ-ON ont donné le mandat de «gagner les élections». Mais ce ne sont pas ces agences qui sont responsables, n'est-ce-pas ?
2012
À nous de choisir
1998
J'ai confiance
1994
Une autre façon de gouverner
1981
Faut rester forts au Québec
1976
On a besoin d'un vrai gouvernement (On mérite mieux que ça)
À lire ces slogans, qui pourrait croire qu'un conflit national larvé et occasionnellement ouvert traverse ce territoire ? Personne ! Une vérité de l'oppression nationale bien maquillée par les agences publicitaires auxquelles nos PQ-ON ont donné le mandat de «gagner les élections». Mais ce ne sont pas ces agences qui sont responsables, n'est-ce-pas ?
Et pour ceux qui penseraient qu'Option nationale se démarque du PQ :
Liste des slogans électoraux d'Option nationale
2012
2014
Oui ou non, entreprendrez-vous un référendum dans le prochain mandat pour un Québec indépendant?
Quelles niaiseries pour un parti tout juste créé et qui n'avait rien à perdre !
Aparté. Pour André Racicot, ON « nous sert une désopilante fricassée linguistique, sous forme de question à Mme Marois. Cette question du chef Sol Zanetti est renversante sur le plan linguistique. Elle montre que le français au Québec, avec des amis pareils, n’a vraiment pas besoin d’ennemi.
En français : Organiserez-vous un référendum sur l’indépendance du Québec au cours du prochain mandat? »
http://andreracicot.ca/les-slogans-electoraux/
Mais on ne chipotera pas sur la qualité du français d'Option nationale. Allons tout de suite à l'essentiel. Rien ne distingue ON du PQ dans leurs efforts pour maquiller le conflit national qui divise les «descendants des vaincus» et les maîtres du jeu depuis 150 ans. Également sibyllins, se gardant bien d'interpeler les gardiens de la prison constitutionnelle, aucun des slogans présentés aux Québécois par le PQ ou ON ne peut rivaliser avec l'éclairante et simple vérité, celle de Daniel Johnson qui titrait : Égalité ou indépendance.
Que font-ils ? Que font ces autonomistes moroses, déprimés ou épuisés ? Au lieu de dévoiler les rapports de domination dans leur nudité ils se consacrent à la pédagogie. Ils oublient que ce qui aurait dû faire école n'a jamais été repris, mais on se donne néanmoins des missions de pédagogues.
Le projet de modifier le statut constitutionnel du Québec n'a été qu'une suite de levées de rideaux sur une comédie burlesque peuplée de prestidigitateurs qui s'affairent à éviter la lutte politique en accusant le peuple de ne pas avoir suivi. Un jugement qui est d'ailleurs totalement faux. Ce sont les chefs qui ont lâché le morceau, quatre fois en cinquante ans. L'élite missionnaire respectable de notre peuple de jadis est devenue, grâce au progrès, l'élite démissionnaire d'aujourd'hui. D'où l'obligation de la pédagogie des soins de fin de vie, une pédagogie sans objet, confinée à la bourgade, tel le mythe de Sisyphe, une quête perpétuelle d'indépendance sans possibilité de libération.
__________________________
1. Les «descendants des vaincus», expression employée souvent par le principal père fondateur de la Confédération, George Brown, pour décrire l'identité de ceux avec qui il négociait l'accord constitutionnel de 1867. Dans les termes des constituants, les promesses faites et les accords passés le furent avec les «descendants des vaincus». Or, les «descendants des vaincus», expression que nous pouvons considérer comme faisant partie de notre identité constitutionnelle, ont voté majoritairement en faveur du référendum de 1995.
1. Les «descendants des vaincus», expression employée souvent par le principal père fondateur de la Confédération, George Brown, pour décrire l'identité de ceux avec qui il négociait l'accord constitutionnel de 1867. Dans les termes des constituants, les promesses faites et les accords passés le furent avec les «descendants des vaincus». Or, les «descendants des vaincus», expression que nous pouvons considérer comme faisant partie de notre identité constitutionnelle, ont voté majoritairement en faveur du référendum de 1995.
2. «Au PQ, on ne s'était pas cassé la tête pour concevoir le nationalisme du vingt et unième siècle. On ne s'était pas non plus donné la peine de traduire la défaite de 1995 comme le résultat d'une agression fédérale pure et simple et la défection de Parizeau, comme la basse désertion d'un membre de sa bourgeoisie entrelardée. Sortie de scène d'autant moins perceptible qu'elle était accomplie par un homme dont la sincérité et les efforts ne sauraient être remis en doute, mais d'autant plus catastrophique qu'elle interdit justement la conception d'un après 1995 autrement que sous les formes spectrales de Lisée et consorts. Alors qu'il détenait le pouvoir, le PQ a toujours préféré vénérer la moralité vide à l'intérieur du fédéralisme plutôt que de mettre à mal l'ordre constitutionnel unitaire.»
(NAÎTRE COLONISÉ EN AMÉRIQUE, Christian Saint-Germain, 2017, pp 83-84)
(NAÎTRE COLONISÉ EN AMÉRIQUE, Christian Saint-Germain, 2017, pp 83-84)
jeudi 16 novembre 2017
Quatre infanticides constitutionnels en cinquante ans !
Les tentatives pour modifier le statut constitutionnel du Québec meurent toutes prématurément
Lorsque René
Lévesque procéda à l'abandon officiel de la souveraineté en 1984,
pour épouser ce qu'il qualifia lui-même de « beau
risque », le parti éclata ! Un clash
semblable se produisit lors du départ
de Jean-Martin Aussant,
en
2011. Un autre
mélodrame !
Mais à quoi riment
donc depuis 50 ans ces crises devenues si prévisibles entre
« indépendantistes déterminés » et « souverainistes
associatifs » plus conciliants ? Une explication
courante voudrait que la prépondérance d'un camp sur l'autre nous
ferait avancer ou pas, que l'on s'approche du but ou que l'on s'en
éloigne. Est-ce bien le cas ? Il est permis d'en douter.
Par un aveu
surprenant, René Lévesque va nous aider à réfuter cet antagonisme
apparent. En 1967, dans une sorte d'éclair de lucidité, il écrivait :
« le
minimum vital pour le Québec est un "maximum ahurissant et
tout à fait inacceptable" pour le Canada anglais ».
Il ne pouvait mieux dire ! La conséquence immédiate de cette
réalité dévoilée ne serait-elle pas de renvoyer dos à dos les
deux camps autonomistes et leur réthorique concurrente ? Tant ils sont comme cul et
chemise par leur refus de croire que tout ce qu'ils peuvent formuler
constitue « un maximum ahurissant et
tout à fait inacceptable » pour le Canada anglais. Devant un
tel mur d'intransigeance dénoncé par Lévesque, le comportement
avisé ne serait-il pas d'adopter la position d'une résistance
obstinée ? De se préparer à une
lutte organisée qui ne connaîtrait pas de trêve ? Ne
serait-ce pas chez les nôtres de s'armer d'une volonté à toute
épreuve pour arracher enfin quelques gains autour d'un « minimum
vital » ? Que nenni. Des quatre
passes d'armes d'importance contre
Ottawa en cinquante ans, aucune n'a satisfait aux exigences minimales de la rigueur et de la
détermination qu'aurait dû inspirer le jugement tranchant de René
Lévesque sur le Canada.
Le Canada maître
absolu du jeu politique
Le Canada anglais a
toujours été le maître absolu du jeu politique. En cinquante ans,
le Québec a eu beau s'escrimer à formuler ses revendications - minimales, ou maximales - il n'en fera aboutir aucune. Qu'il revendique un ajustement de statut ou l'indépendance c'est du pareil au même.
En somme, tous les événements donnèrent raison à Lévesque. Le
fédéral n'a jamais consenti à rien car rien ne l'obligea à
infléchir son intransigeance. Rien ne l'obligea à réfléchir
autrement qu'en ses propres termes sur l'avenir du Canada, la
présence du Québec et du Canada français ne réussissant jamais à
s'imposer dans ses équations.
Vu sous cet angle,
quelle différence y a-t-il en effet entre l'indépendance et un
statut particulier ? En pratique, il n'y en a
aucune car les ambitions autonomistes sont vouées à échouer devant une intransigeance absolue.
Et elles seront indéfiniment ajournées tant que la classe politique continuera de défendre avec si peu
de détermination et de sérieux les intérêts du Québec.
Sortir du coma
politique
Pour repartir au
combat il serait avisé pour les Québécois de sortir du « coma
politique » dans lequel ils sont entrés au lendemain du
référendum de mai 1980.i
Ils devraient comprendre que la « Confédération n'a jamais
été un pacte librement consenti avec un partenaire de bonne foi,
mais l'imposition d'une condamnation irrévocable avec un enfermement
perpétuel », comme l'explique Me Christian Néron,
constitutionnaliste, consulté pour la rédaction de cette série.
Les graves carences
de leadership ont commencé dès le début avec Lévesque qui a vite
oublié sa propre lucidité, cité plus haut. Au lieu d'accorder ses actes avec sa
lumineuse précaution, notre stratégie a gravement sous-estimé l'entêtement - prévisible - du Canada à conserver le statu quo, et, il ne s'est jamais préparé à mener un combat opiniâtre et de longue
haleine. Faisant
volte-face, il a cru - ou fait croire ? - que le
changement de statut du Québec pouvait se décider dans la courte
parenthèse d'un référendum. Une parenthèse ouverte et aussitôt refermée.
Un navire amiral
sans pilote
Chaque fois que des occasions de marquer des points à notre
avantage ont été ignorées ou négligées, les plus déterminés en ont mis la faute sur le compte d'un pilotage mené par des « réformateurs du fédéralisme ». Cette explication
ne tient pas vraiment la route non plus car elle refuse de voir que nos échecs à répétition ne viennent pas d'erreurs de pilotage mais de l'absence
totale de pilotage ! C'est ahurissant,
mais il est temps que les passagers comprennent qu'il n'y a jamais eu
de pilote au gouvernail du navire amiral ! Une peur maladive de
s'emparer du gouvernail a toujours été le réflexe typique de notre état major national depuis
Georges-Étienne Cartier, une étourderie morbide qui a continué sa
belle carrière tout au cours de l'ère péquiste. Bye bye
libération !
De révolution
tranquille à colonie tranquille
Les prétentions si
souvent répétées que la révolution tranquille nous aurait libérée
de notre mentalité de colonisés ne seraient qu'une façon de se détourner de la réalité pour se réfugier dans de belles illusions. En fait, le Canadien
français se complaît tellement dans son statut de colonisé, vivant au dessous du minimum vital, qu'il
n'arrive plus à s'imaginer qu'il pourrait s'en sortir un jour. René
Lévesque en est l'exemple le plus dramatique.
En réalité, et
c'est là toute l'affaire, que ce soient les « séparatistes »
ou les « provincialistes » qui aboient le plus fort, nous
restons essentiellement dans la distraction coloniale des vœux pieux
et des programmes enluminés. On a toujours cru plus vertueux de
mener un combat pour prouver la viabilité d'un Québec indépendant - se conforter les uns les autres - plutôt que de faire le
procès en bonne et due forme d'un régime qui nous a été imposé et qui nous a toujours privé d'un « minimum vital ». C'est la cécité du colonisé qui nie la présence d'un éléphant dans la
pièce. La problématique que pointait lucidement Lévesque et que personne n'a
suivie - pas lui-même - laissant libre cours à la volonté de domination du
régime anglo-canadien et ses forfaits.
Le Canada
remporte la bataille des mentalités
La conséquence
c'est que la bataille des mentalités a été gagnée jusqu'ici par le Canada.
À tel point que beaucoup de ceux qui voteront Parti québécois aux
prochaines élections de 2018 seront toujours sous l'influence du
Canada. Beaucoup sont persuadés de son bon droit, de sa bonne foi, de
sa supériorité morale. Nous récoltons l'abandon de l'éducation
politico-historique, qu'elle fut de Lionel Groulx, de Maurice Séguin
ou du RIN. Au lieu de travailler les fondamentaux de notre
combat national et de les consolider, nous avons trop misé sur une «pédagogie» d'enfants d'école pour grignoter des « OUI ». Comme si de convaincre « ceux qui ne comprenaient pas » suffisait.
Dans sa psychologie
politique, le Canada anglais a compris les limites de son adversaire
domestiqué depuis longtemps : pour lui il est inutile de
s'énerver devant les aboiements de quelques chiens battus et
édentés.
De la
contradiction principale
On me permettra ici
un petit détour pour des raisons d'utilité pédagogique. À
l'époque de la guerre sino-japonaise, la Chine est envahie par le
Japon. Pour s'opposer aux membres de son parti qui veulent continuer
de combattre le Kuomintang, Mao Zedong prononce une conférence en
1937, qui deviendra le petit essai intitulé « De la contradiction
». Il explique alors l'importance de bien identifier la
contradiction principale, c'est-à-dire celle dont dépendent toutes
les autres. Dans ce cas de figure, la contradiction principale posait
la nécessité de mettre fin aux hostilités entre le Kuomintang et
le Parti communiste, d'unir les deux camps chinois pour chasser
l'envahisseur japonais, l'ennemi principal. Cela
semble plein de bon sens.
Pour le René Lévesque de tous les jours, et en
fin de compte pour toute la tradition péquiste, la promotion de « la
cause » ne s'est jamais départie d'ambivalences à l'endroit
du Canada. On ne s'est jamais affranchi d'une auto censure qui, bien
que ponctuée d'occasionnels coups de gueules, s'est toujours
interdit d'instruire la fourberie du fédéralisme et de son insatiable volonté de puissance.
Des
quatre tentatives pour modifier le statut du Québec depuis cinquante ans
La
première
Quand René Lévesque nous lance le soir de la
défaite référendaire son « À la prochaine! », c'est
qu'il renonce à poursuivre le combat par tous les autres moyens
légitimes et raisonnables qui sont à sa disposition. Il venait de s'écraser sous
la peur et nous conseillait d'en faire tout autant. À quoi bon un minimum vital pour le Québec ?
La
deuxième
Quand, en
1981, revenu bredouille et trahi d'Ottawa, une performance néanmoins marquée
par l'impéritie de la délégation du Québec, il soufflera à nouveau sur les braises d'une indignation légitime. Contre toute attente, il fera volte face pour les éteindre quelque mois plus tard. Il renverra aux douches
ceux qui, le prenant encore pour chef, étaient montés - pour
une deuxième fois - aux barricades à son appel.
La
troisième
Quand
le Canada a renié sa parole – une autre fois – et que l'Accord
du lac Meech a fait long feu, Robert Bourassa, premier ministre à
l'époque, se retrouvait avec tous les atouts en mains pour rebondir. Il le laissera d'abord supposer en livrant un discours prometteur du
22 juin 1990. Il fera volte face à sa manière en laissant passer le temps pour que refroidisse l'indignation nationale et faire oublier son renoncement à faire suivre ses paroles par des actes.
La
quatrième
Dans la foulée, Parizeau profite à son tour de l'indignation de Meech, qui reste présent dans
les esprits, pour repartir au front. Il se lance avec témérité
dans une nouvelle aventure référendaire dans laquelle il placera
toutes ses billes. Mais il démissionne précipitamment à son tour le soir même du référendum
de 1995, un geste prématuré qu'il regrettera plus tard. Trop tard ! Il avait oublié sur le moment qu'il pouvait attaquer des résultats
contestables, ou doubler la mise. Il s'écrase lui aussi et renonce à toute forme de combat. Dans une approche mal inspirée par le tout ou rien, il procède à la démobilisation générale de ses partisans. Quand il a perdu un combat - et non la guerre - il reste toujours à un chef la liberté de se cramponner à ses acquis, déjouer les manoeuvres à venir de l'adversaire, garder haut les coeurs en attendant une prochaine passe d'armes et des jours meilleurs.
Tableau
Référendum | Rapatriement constitution | Négoci-ations du lac Meech | Référen-dum 1995 | |
Début | 16 nov. 1974 Adoption de l'étapisme | 15 sept. 1980 Conférence constitutionnelle | 30 avril 1987 Conférence constitutionnelle au lac Meech | 12 sept. 1994 Élection de Jacques Parizeau |
Fin | 20 mai 1980 |
17 avril 1982 | 22 juin 1990 | 30 octobre 1995 |
Protagonistes du Québec | René Lévesque-Morin | René Lévesque-Morin | Robert Bourassa (PLQ) | Jacques Parizeau |
Protagonistes fédéral | P-E Trudeau | P-E Trudeau | Brian Mulroney / P-E Trudeau |
Jean Chrétien |
Raison de l'échec | Abandon du combat par René Lévesque (1er coma politique) | Négligence et irresponsabilité du camp québécois (2è coma politique) | Abandon du combat par Bourassa |
Abandon du combat par Jacques Parizeau (3è coma politique) |
Possibilité de réaliser des gains statutaires | Non (Demande de négocia-tions) |
Oui (Négociations) |
Oui (Négociations) |
Non |
Gains pertes réalisés | Perte | Perte + (droit de veto du Québec) | Neutre | Perte |
Possibilités d'établir un rapport de force favorable si le combat avait été continué (mon estimation) | 40 p.c. | 60 p.c. | 90 p.c. | 60 p.c. |
Me
Christian Néron explique : « Quand
René Lévesque ou Lucien Bouchard refusent de contester les
décisions de la Cour suprême (sept. 1981) et l'imposition de la
nouvelle constitution, ou d'exiger que ce dossier capital
soit soumis en appel devant le Comité judiciaire du Conseil privé
(Londres) ou encore que le dossier soit soumis à un tribunal
international », là
encore, les chefs se sont défilés devant leurs obligations. « Un
combat constitutionnel de la plus haute importance entre deux nations
n'est-il pas un conflit inter-national ? »
Maître Néron soutient qu'en matière
constitutionnelle il ne faut jamais cesser de lutter pour le respect
de ses droits et libertés. Il donne en exemple la
constitution de l'Angleterre, qui a presque mille ans, poursuit-il,
et qui est faite en grande partie d'une succession de combats éprouvants pour
la préservation de ses droits. Mais ici, chez-nous, il est interdit
de se battre pour un minimum vital et, surtout, d'indisposer notre partenaire canadien !
Pour Me Néron : « Le droit
international coutumier ne reconnaît-il, depuis le XVIè siècle, le droit de tout peuple de réclamer justice, et même de se faire justice lorsqu'il n'y a aucune autorité
compétente pour le faire ? La doctrine de Vitoria et Suarez est éloquente à ce sujet ».
De
la décolonisation des mentalités
En
fin de compte, les Canadiens-français-québécois tentent la
quadrature du cercle depuis 1867. Et en compagnie du PQ depuis 1968.
Si les Québécois et leurs chefs continuent de rejeter a
priori
tout geste qui occasionnerait la moindre montée de tensions entre le
Québec et le Canada; si après avoir renoncé d'avance à oser un
rapport de force qui nous serait favorable ils réclament du même
souffle un changement de statut pour le Québec, c'est de la
foutaise ! Vu l'absence de toute forme de pugnacité, du moment que le
Canada bombe le torse, vu la facilité avec laquelle nos chefs de
file décrochent avant terme et plient armes et bagages, le Québec
se présente désormais au Canada, et au monde, comme un joueur qui a
décidé de s'exclure lui-même du jeu. En nous inclinant devant toutes ces injustices, au point d'y laisser le respect de nous-mêmes, nous avons décidé de notre destin.
Tout ce temps, en contre-partie, nos chefs péquistes ont toujours voulu se dédouaner de leur manque de leadership et de persévérance en reportant leurs échecs sur le dos d'une population qui n'aurait pas suivi ! Naturellement, ils négligent de dire qu'il n'y avait pas grand monde fiable à
suivre. Qui serait assez idiot pour suivre un chef qui n'a aucune stratégie, qui ne croît pas en sa cause, qui s'incline au premier
vent contraire, qui oublie même de se respecter ?!
Le
soir du 30 octobre 1995, Jacques Parizeau, dans un message de dépit,
renvoyait chez eux ses militants. N'était-ce pas un message
d'abdication envoyé à la population ? Qu'il fallait nous écraser devant la défaite ? Comme
Lévesque avant lui, il nous a laissé avec un sentiment d'amertume, comme si nous n'avions pas perdu un combat mais la guerre ! Les chiffres de la
démobilisation parlent d'eux-mêmes. Le PQ passa de 300 000 membres
à 70 000 sous René Lévesque, et éventuellement la moitié moins.
Si
bien que, depuis cinquante ans, ce qu'il conviendrait d'appeler
chez-nous la
contradiction principale
est un chantier désert. Comme si elle ne se situait pas entre le
refus du Canada anglais de faire toute concession, et la volonté des
«descendants des vaincus» (expression constitutionnalisée) de briser les cadres d'une prison constitutionnelle dans laquelle on
les a enfermés, leurrés par
des promesses aussitôt trahies. Faute
de mettre cette contradiction au premier plan du combat politique,
sauf de cibler correctement l'ennemi, toutes les nuances de la
mouvance autonomiste ne peuvent que se retrouver dans une foire
d'empoigne perpétuelle. Inversement, mettre la question de
l'intransigeance du Canada sur la sellette, démaquiller l'hypocrisie
de sa démocratie, dénoncer ses promesses trahies – dont la plupart ont une valeur constitutionnelle – ne
pourrait que renforcer notre unité.
Lévesque-Morin
– Un scandale national
Le
lecteur pourra lire en annexe un texte particulièrement troublant de
Guy
Laforest
dans lequel il expose la désinvolture, l'improvisation et, somme
toute, l'irresponsabilité du tandem Lévesque-Morin à l'occasion
des délibérations qui conduisirent au rapatriement de la
Constitution. Il y avait là pour nous une occasion de faire des
gains sur le «minimum vital», voire davantage. Mais le Québec, en
raison de la pauvreté extrême de sa direction politique, est non
seulement revenu d'Ottawa les mains vides, mais déshabillé !
Il avait renoncé à son droit de veto
pour un plat de lentilles. Une bande d'amateurs aux commandes d'un
navire où il n'y avait même pas un matelot au gouvernail ! Une équipée dont le second de bord
était un agent d'influence du fédéral tenu en laisse par la Gendarmerie
royale du Canada (GRC). Une équipée dont l'irresponsabilité fait
honte à la nation, un scandale jamais dénoncé par l'entourage de
Lévesque, voué à ne pas ternir sa réputation. Le lecteur
remarquera qui était aux premières loges tout récemment pour
rendre hommage à René Lévesque à l'occasion du trentième
anniversaire de sa mort.
En
donner toujours plus sans rien exiger
Plus récemment, nous voyons Jean-François
Lisée se ramollir doucereusement pour octroyer des « droits historiques »
aux anglophones. Pourquoi ouvrir la porte à d'autres concessions, alors que les droits linguistiques des anglophones sont légalement encadrés par les articles 96 et 133 de la constitution, lesquels avaient été négociés à huis clos en janvier 1867 ? Pourquoi laisser
supposer que les droits linguistiques des anglophones seraient
menacés, alors que seuls les nôtres le sont ! Ce chef, qui a
mis de coté la question de la souveraineté pour un minimum de quatre ans, ne se prive pas pour
nous paver la voie des prochains reculs. La tradition canadienne-française de donner d'abord ses perles, pour n'avoir plus que sa
chemise à négocier, a la vie dure. Nous voyons bien qu'après cent
cinquante ans d'un triste cumul d'échecs, notre mentalité n'a pas changé.
Adopter
« l'Autre » pour épouser notre déclin
Toute relance du combat pour nos droits
et libertés nationales ne pourra réussir sans un sursaut des
mentalités. Elles devront prendre acte de la réalité brutale du
Canada anglo-saxon-protestant, pour qui « le minimum vital pour le Québec est un maximum ahurissant et tout à fait inacceptable » pour ses intérêts. C'est sa conception du vivre à deux. La décolonisation psychologique avait
bien commencé dans les années 1960, menée par des hommes courageux comme Marcel Chaput, André d'Allemagne, Pierre Bourgault, regroupés au sein du Rassemblement pour l'indépendance nationale (RIN). Mais tout ça s'est vite
étouffé avec le plus attendrissant de nos colonisés, René
Lévesque. Il rejeta non seulement le RIN mais toute notre tradition résistante de la « survivance » en même temps. Si nous l'aimons tant, c'est sans doute parce que c'est
lui qui incarne le mieux les faiblesses de la typologie québécoise.
On
a cru bien trop vite achevée la décolonisation de notre mentalité. Nous
l'avons confondue avec une perméabilité toute grande à la culture de masse américaine, laquelle se juxtaposait au rejet de nos traditions
culturelles et religieuses, et ce, sans trop de discernement. La révolution
tranquille, portée par un baby
boom
regorgeant d'énergie, nous a bien abreuvés et nourris aux agapes
d'une aliénation accrue. Un rejet radical du passé qu'on a pris
pour une œuvre de libération.
ANNEXE
LES
RÉVÉLATIONS DE GUY LAFOREST
(Mes
soulignements)
Incohérence
et désorganisation
Quand
on examine notre histoire sous l'angle de la longue durée, les
référendums de 1980 et de 1995 prennent l'allure de rébellions
ratées de l'ère démocratique, en lien avec les rébellions matées
de l'ère impériale que furent les soulèvements de 1837-1838.
Perdre une action de cette nature entraîne des conséquences
négatives. Toute analyse sérieuse des documents de l'époque révèle
l'ampleur du désarroi de René Lévesque et de son gouvernement au
lendemain de l'échec du référendum sur la souveraineté-association
de mai 1980.
Rien ne fut fait pour préparer stratégiquement les lendemains d'une possible défaite. Sur le terrain de l'alliance avec les provinces récalcitrantes aux initiatives unilatérales de M. Trudeau, et notamment dans la guérilla diplomatique menée à Londres, le gouvernement Lévesque a bel et bien eu quelques succès tactiques après le référendum de 1980. Il est toutefois constamment resté sur la défensive, paraissant souvent incohérent et désorganisé.
Décision précipitée
Le 16 avril 1981, trois jours après la victoire électorale de René Lévesque et du Parti québécois contre les libéraux dirigés par Claude Ryan, le gouvernement du Québec a accepté, dans un document qui consolidait un front commun de provinces opposées aux projets de M. Trudeau, une formule d'amendement qui substituait le principe d'un retrait avec compensation financière au droit de veto du Québec. Cette décision fut entièrement improvisée.
Au cours de la campagne électorale, la veille organisationnelle sur ces questions fut confiée au ministre responsable, Claude Morin, et à son sous-ministre Robert Normand. Le Conseil des ministres ne fut jamais consulté sur cette orientation. René Lévesque prit cette décision de manière précipitée trois jours après l'élection. Le Québec aurait pu beaucoup mieux gérer l'enjeu du droit de veto, n'acceptant d'y renoncer qu'au lendemain d'un accord global auquel il aurait pu souscrire.
Lévesque vs Ryan
Entre 1978 et 1982, Claude Ryan a incarné au Québec une vision du renouvellement du fédéralisme canadien en harmonie avec les intérêts du Québec comme société nationale et distincte. Pour protéger le Québec, le gouvernement Lévesque aurait pu faire un bien meilleur usage des lumières et de la bonne volonté de M. Ryan. Certes, la politique est affaire de combat; Lévesque et Ryan avaient ferraillé avec acharnement en campagne référendaire et lors des élections de 1981. Toutefois, Lévesque a choisi de ne jamais intégrer Ryan dans un dessein stratégique visant à contrer les projets de M. Trudeau. Ce dernier craignait beaucoup Claude Ryan. Lors de la fatidique semaine des négociations constitutionnelles de novembre 1981, M. Ryan a essayé d'entrer en communication avec M. Lévesque et son équipe. Ses appels n'ont jamais eu de réponse.
Véritable cafouillis
Sur le front judiciaire, le Québec et ses procureurs sont allés à quatre reprises devant les tribunaux en 1981 et 1982. Leur performance fut peu impressionnante. Pourquoi remplacer l'équipe en place par l'ex-juge de la Cour suprême, Yves Pratte? Pourquoi attendre de très longues semaines avant de décider de soumettre la question du droit de veto du Québec en renvoi à la Cour d'appel du Québec après novembre 1981? Pourquoi ne jamais avoir plaidé, sur la base de l'article 94 de la Loi constitutionnelle de 1867, la nécessité du consentement de l'Assemblée nationale du Québec pour toute réforme touchant la juridiction des provinces sur la propriété et les droits civils, invasion reconnue par le gouvernement fédéral lui-même et par les décisions antérieures des tribunaux?
Si l'oeuvre d'ensemble paraît peu cohérente et souvent improvisée, cela s'est révélé sous son jour le plus cru lors de la conférence constitutionnelle de novembre 1981: climat anarchique et peu professionnel dans l'entourage de proximité de M. Lévesque, équipe ministérielle d'appui de second ordre, cafouillis total de René Lévesque lui-même et de son équipe à la suite de l'offre référendaire de M. Trudeau le matin du 4 novembre, absence de vigilance lors de la dernière nuit de la conférence.
Rien ne fut fait pour préparer stratégiquement les lendemains d'une possible défaite. Sur le terrain de l'alliance avec les provinces récalcitrantes aux initiatives unilatérales de M. Trudeau, et notamment dans la guérilla diplomatique menée à Londres, le gouvernement Lévesque a bel et bien eu quelques succès tactiques après le référendum de 1980. Il est toutefois constamment resté sur la défensive, paraissant souvent incohérent et désorganisé.
Décision précipitée
Le 16 avril 1981, trois jours après la victoire électorale de René Lévesque et du Parti québécois contre les libéraux dirigés par Claude Ryan, le gouvernement du Québec a accepté, dans un document qui consolidait un front commun de provinces opposées aux projets de M. Trudeau, une formule d'amendement qui substituait le principe d'un retrait avec compensation financière au droit de veto du Québec. Cette décision fut entièrement improvisée.
Au cours de la campagne électorale, la veille organisationnelle sur ces questions fut confiée au ministre responsable, Claude Morin, et à son sous-ministre Robert Normand. Le Conseil des ministres ne fut jamais consulté sur cette orientation. René Lévesque prit cette décision de manière précipitée trois jours après l'élection. Le Québec aurait pu beaucoup mieux gérer l'enjeu du droit de veto, n'acceptant d'y renoncer qu'au lendemain d'un accord global auquel il aurait pu souscrire.
Lévesque vs Ryan
Entre 1978 et 1982, Claude Ryan a incarné au Québec une vision du renouvellement du fédéralisme canadien en harmonie avec les intérêts du Québec comme société nationale et distincte. Pour protéger le Québec, le gouvernement Lévesque aurait pu faire un bien meilleur usage des lumières et de la bonne volonté de M. Ryan. Certes, la politique est affaire de combat; Lévesque et Ryan avaient ferraillé avec acharnement en campagne référendaire et lors des élections de 1981. Toutefois, Lévesque a choisi de ne jamais intégrer Ryan dans un dessein stratégique visant à contrer les projets de M. Trudeau. Ce dernier craignait beaucoup Claude Ryan. Lors de la fatidique semaine des négociations constitutionnelles de novembre 1981, M. Ryan a essayé d'entrer en communication avec M. Lévesque et son équipe. Ses appels n'ont jamais eu de réponse.
Véritable cafouillis
Sur le front judiciaire, le Québec et ses procureurs sont allés à quatre reprises devant les tribunaux en 1981 et 1982. Leur performance fut peu impressionnante. Pourquoi remplacer l'équipe en place par l'ex-juge de la Cour suprême, Yves Pratte? Pourquoi attendre de très longues semaines avant de décider de soumettre la question du droit de veto du Québec en renvoi à la Cour d'appel du Québec après novembre 1981? Pourquoi ne jamais avoir plaidé, sur la base de l'article 94 de la Loi constitutionnelle de 1867, la nécessité du consentement de l'Assemblée nationale du Québec pour toute réforme touchant la juridiction des provinces sur la propriété et les droits civils, invasion reconnue par le gouvernement fédéral lui-même et par les décisions antérieures des tribunaux?
Si l'oeuvre d'ensemble paraît peu cohérente et souvent improvisée, cela s'est révélé sous son jour le plus cru lors de la conférence constitutionnelle de novembre 1981: climat anarchique et peu professionnel dans l'entourage de proximité de M. Lévesque, équipe ministérielle d'appui de second ordre, cafouillis total de René Lévesque lui-même et de son équipe à la suite de l'offre référendaire de M. Trudeau le matin du 4 novembre, absence de vigilance lors de la dernière nuit de la conférence.
i Selon
l'expression de Martine Tremblay dans son livre : Derrière
les portes closes: René Lévesque et l’exercice du pouvoir
(1976-1985)
vendredi 3 novembre 2017
Nouveau nom - même mission
[ première édition - 30 janvier 18:03 ]
La CAQ appliquerait un taux de taxation scolaire uniforme.
https://coalitionavenirquebec.org/fr/blog/2018/01/23/taxe-scolaire-caq-appliquera-taux-plus-bas-importe-region/
La réplique du député de Bonaventure (PQ) à l'annonce de la CAQ
La CAQ appliquerait un taux de taxation scolaire uniforme.
https://coalitionavenirquebec.org/fr/blog/2018/01/23/taxe-scolaire-caq-appliquera-taux-plus-bas-importe-region/
La réplique du député de Bonaventure (PQ) à l'annonce de la CAQ
« Nous ne sommes pas contre l'équité et l'uniformisation en matière de taxes mais...
lundi 30 octobre 2017
Avec le trentième anniversaire de la mort de René Lévesque et les cinquante ans du Parti québécois en 2018, comment
redonner aux Québécois francophones un rapport de force favorable,
condition indispensable à tout changement de statut politique ?
L'HÉRITAGE
DE RENÉ LÉVESQUE, UN ÉCHEC POLITIQUE QUI SE PROLONGE
Les revendications du
Québec ne sont plus prises au sérieux par personne, ni au Canada ni
ailleurs dans le monde. C'est peut-être que toute l'affaire n'a
jamais été considérée comme sérieuse ? Dans le but
d'alimenter le débat sur l'avenir politique du Québec, je propose
une
réévaluation des événements qui ont marqué un demi siècle de
péquisme. Cinquante ans au cours desquels le statut du Québec a
été modifié à son désavantage. Il y a encore beaucoup de déni
concernant cet échec et bien des préjugés sur ses causes qui,
malgré l'évidence, sont encore entretenus par une certaine élite
politique et le milieu
universitaire. Trouver des explications appropriées à ce qui
fut une dégringolade de notre potentiel d'affirmation nationale nous
semble indispensable. À défaut, comment pourrait-on reprendre
l'offensive en faveur de nos droits et libertés ? Voici un
rappel historique chevillé aux faits et dépourvu d'esprit partisan.
Un condensé de cinquante années de péquisme.
Les
années péquistes
L'option de René
Lévesque
Le Parti québécois a été
fondé sur l'idée de réaliser une forme de souveraineté-association
avec le Canada. Son orientation constitutionnelle aboutissait à une
refonte du fédéralisme, ce que René Lévesque écrit dans son
livre Option
Québec. Pour le
Québec, c'était « jouir
d'un minimum vital d'autonomie interne » dans le cadre d'une union
monétaire et économique avec le Canada. Le pays réformé prendrait
pour nom l'Unité
canadienne.
Cinquante ans plus tard, la confusion continue de régner sur les
véritables objectifs constitutionnels de ce parti dans bien
des esprits, notamment chez ses dirigeants. Il est clair pour
quiconque se donne la peine de repasser le fil des événements
qu'une orientation indépendantiste bien comprise, si on respecte le
sens des mots, n'a jamais prévalu au sein du PQ, et ce, même du
temps de Jacques Parizeau. Au moment du référendum de 1995, ce
dernier pouvait compter sur les doigts de la main les appuis au sein
de son cabinet. Tous les autres étaient déjà passés dans le camp
de Lucien Bouchard, prêt à passer le rouleau compresseur d'une
austérité bien provinciale et, surtout, à oublier les folies
constitutionnelles des dernières années. C'est ce que me rappelait
récemment Richard Le Hir, lequel avait été nommé ministre à la
Restructuration à l'époque.
Le parcours du PQ, sous la gouverne de
René Lévesque, Pierre-Marc Johnson, André Boisclair, Bernard
Landry, Lucien Bouchard n'est pas, et n'a jamais été,
indépendantiste ; à moins de se laisser duper par quelques
déclarations patriotiques pour sauver les apparences ou se duper
soi-même. Comme le fait, pour citer un exemple, cette
vidéo d'Option nationale, qui commence avec
cette perle : « Lors de nos deux récentes tentatives
d'accéder à l'indépendance...». Ainsi, réclamer un mandat pour
négocier la souveraineté-association devient, par la magie des
mots, une « tentative d'accéder à l'indépendance ». Une
déformation de la vérité qui sévit encore, après cinquante ans,
et qui est d'autant plus révélatrice qu'Option nationale se targue
d'avoir fait plus que quiconque ses devoirs sur la question
nationale.
Qu'on ne soit jamais parvenu à faire
consensus sur les orientations essentielles du PQ constitue une
faiblesse qu'il a lui-même contribué à entretenir. Naviguer sans
fixer de cap, quel qu'il soit, et le tenir, est pour un « navire
amiral » la source de toutes les dérives. Les reculs
successifs que ce parti a fait subir au Québec depuis cinquante ans
nous sont laissés en héritage.
Une ambiguité constitutionnelle
jamais surmontée
« Je
ne blâme point ceux qui désirent dominer, mais ceux qui sont trop
disposés à obéir »
(Hermocrate
de Syracuse, cité par Thucydide 4, 61, 5)
L'ambiguïté constitutionnelle
insurmontable du PQ s'expliquerait par deux raisons.
La première se situe dans
l'opposition entre le Québec et le Canada. Le Parti libéral du
Canada et les fédéralistes de tout bord n'ont jamais ménagé les
efforts pour accoler au PQ l'étiquette péjorative de
« séparatisss... », et de « parti qui veut briser
le Canada, le plus beau pays du monde ». Cette propagande
martelée sans arrêt avait pour but de préserver le statu quo
en peignant le PQ sous les traits les plus repoussants. Bien que
dépourvu de rigueur sémantique, ce braquage a toujours rapporté
gros dans les urnes et, surtout, à l'occasion des deux référendums.
Si les chefs fédéralistes à Ottawa n'ont jamais voulu d'une
séparation, ils ne voulaient pas davantage d'une réforme qui aurait
octroyé des droits politiques égaux aux « descendants des
vaincus », comme George
Brown, - véritable père de la Confédération (1867) –
l'avait promis lors des débats parlementaires sur la Confédération.
C'est par leur démagogie tapageuse contre le « séparatisme »
que les fédéralistes, bien en selle à l'offensive, sont parvenus à
faire oublier leurs promesses constitutionnelles mille fois brisées
depuis 1867. Bien des
péquistes, novices en matière constitutionnelle, se laissent
prendre à ce jeu de propagande, avalant à leur tour la méprise que
leur parti était prêt pour l'indépendance. Une thèse rarement
démentie dans un sens ou dans l'autre, laissant commodément planer
toutes les équivoques.
La deuxième raison se situe
dans le camp autonomiste et, à ce titre, mérite la plus grande
attention. Elle part de l'étonnante dissolution du Rassemblement
pour l'indépendance nationale (RIN), une décision dans laquelle il
est difficile de voir d'autre motif que celui de servir l'unité
nationale. L'esprit du temps - plus optimiste qu'aujourd'hui ! -
portait à une union moins partisane du camp national afin de donner
plus de poids à la volonté du Québec de se réaliser selon ses
propres intérêts. Cette dissolution était un moyen de dernier
recours pour réaliser l'unité, suite au refus réitéré de René
Lévesque de considérer tout projet de fusion entre les deux partis.
Le Ralliement national (autre parti souverainiste à l'époque) avait
déjà rejoint Lévesque. Alors pourquoi le RIN ne le pourrait-il pas
?
Le RIN, fondé au début des années
60, avait fait un bon bout de chemin dans sa réflexion
constitutionnelle avec Marcel
Chaput, lequel n'entretenait aucune
illusion sur le Canada.
Contrairement au PQ, il revendiquait l'indépendance pure et
simple comme solution nationale. Au-delà de la question
constitutionnelle, les positions du RIN sur les questions
linguistique et sociale indisposaient grandement Lévesque. C'est
pourquoi il ne voulait rien entendre de ce parti. Mais
si, selon lui, une fusion n'était pas possible avec le RIN, comme
elle l'avait été pour le RN, pourquoi fallait-il proscrire tout
dialogue stratégique entre ces deux entités du camp national ?
N'était-il pas hautement souhaitable de favoriser un maximum de
cohésion ? Une attitude inspirée par un rassemblement purement
stratégique n'aurait-t-elle pas permis de sortir de cet imbroglio
par le haut, au bénéfice de l'avenir politique du Québec ?
Mais l'intransigeance de René Lévesque, qui avait brillé
antérieurement chez les libéraux provinciaux, y mit un frein.
Les membres du RIN rejoignirent donc le
PQ, mais un à un, amenant avec eux des convictions indépendantistes
qui contrastaient avec celles des « ex-libéraux
progressistes » de René Lévesque. De ce mariage forcé -
désiré par Pierre Bourgault et combattu sans succès par d'autres
au RIN - résulta une froide cohabitation entre des « indésirés »
et des « légitimes ». Cette relation difficile éclata
au grand jour lorsque l'on vit la mine déconfite d'un René Lévesque
écoutant le discours
de Bourgault au Congrès de 1971. À toutes
fins utiles, Bourgault, qui restait un chef charismatique
remarquable, ne sera malheureusement jamais accepté par la direction
du parti.
On pourrait aussi y voir une affaire de
personnalités : Bourgault n'avait-il pas eu la maladresse de
qualifier Lévesque de « maudit
épais » ? Mais c'était, bien
au-delà des personnalités, l'expression la plus visible de ce qui
était devenu une friction continue entre deux approches politiques
face à l'avenir politique du Québec. Bref, c'est celui qui doutait
de tout et de lui-même qui ouvrira la marche et mènera les troupes
au combat, avec Bourgault, représentant ceux qui ne doutaient pas,
sur le banc des punitions. À Ottawa, le général en chef s'en
réjouissait.
Une affaire bâclée aux graves
conséquences
Cette
affaire bâclée va marquer le PQ pour les décennies à venir.
D'abord, le geste d'abnégation patriotique qu'avait été la
dissolution du RIN ne fut jamais reconnu comme tel. On aurait pu le
faire pour au moins tourner la page avec élégance, pour ne laisser
derrière ni perdants ni victimes. Au contraire, loin de la
reconnaissance attendue, on instilla le doute sur la légitimité des
plus déterminés à réclamer l'indépendance. La méfiance
contamina la vie du parti et rendit impossible l'ouverture de tout
débat permettant de poursuivre l'oeuvre de Chaput et d'Allemagne
( André ). La fermeture d'esprit rendit impossible qu'on
accède, par des délibérations sereines entre militants, à une
lecture claire des fragilités statutaires du Canada. Le parti, privé
d'unité et de l'envergure nécessaire, incapable d'élever le niveau
pour aboutir à une stratégie tournée contre le Canada visant son
talon d'Achille, opta pour l'étroitesse des ambitions. On écarta la
question constitutionnelle qui se situe pourtant au cœur des
intérêts fondamentaux de la nation. On la retira des délibérations
politiques pour la remettre éventuellement entre les mains d'avocats
comme Lucien Bouchard. Au PQ, il ne fut donc jamais question de faire
feu de tout bois contre le Canada.
Même si beaucoup l'ont oublié
aujourd'hui, ou sont trop jeunes pour en avoir eu connaissance, les
frictions se poursuivirent sans relâche. À titre d'exemples,
rappelons les emblématiques crises du « renérendum »
et du « beau
risque » et, de nouveau, à chaque fois
que surgissait la fort délicate question de choisir un chef capable
de rallier tout le monde. Le chef est immanquablement perçu comme
« trop provincialiste » ou soit « trop
indépendantiste ». En fait, ce dernier cas ne concernera que
Jacques Parizeau. Curieusement, les mêmes membres choisiront tour à
tour des « chefs » aussi opposés que Pierre-Marc Johnson
et Jacques Parizeau. Ils seront d'ailleurs tous les deux éjectés.
Au final, on peut dire que la cohabitation des provincialistes et des
indépendantistes n'a jamais été résolue, si ce n'est par la
prépondérance indéniable des premiers sur les seconds. En d'autres
mots, l'esprit de Lévesque l'emportait toujours sur celui de
Bourgault, une constante dont on peut suivre la trace jusqu'à
Jean-Martin Aussant qui claqua la porte en 2011.
Résumons. Dans un combat pour les
droits et libertés nationales, au sein d'un État
dont les faits remontent à 1663, plus de cent
ans avant la conquête anglaise, un chef issu des « descendants
des vaincus », - mots de Brown - qui ne peut être qu'un chef
d'état major, devrait s'efforcer de fédérer toutes les forces,
travailler à bâtir la confiance entre elles pour constituer un
front commun patriotique le plus large possible. Au lieu de cela,
René Lévesque a maintenu nos forces dans la division. Il a décidé
en catimini, avec Claude Morin - qui de son propre aveu recevait de
l'argent de la Gendarmerie royale du Canada pour des rencontres
clandestines - de toutes les questions décisives :
question référendaire douteuse de l'avis de tous (1979), absence
de plan pour continuer ce combat, qui n'était qu'un début,
en cas d'un « non » (1980), négociations
constitutionnelles bâclées et catastrophiques (1981), lesquelles
préfiguraient la nuit des longs couteaux et le rapatriement de la
constitution (1982), qu'on refusa de contester, alors qu'on pouvait
le faire de bon droit. Le navire amiral sans gouvernail se replia
dans la soumission.
Parallèlement, notre état major, qui
ne voulait pas assumer ses responsabilités, a provoqué la
cristallisation des divisions internes par des parti pris de plus en
plus clivant et obsessif justifiés par la hantise de l'extrémisme.
Comment peut-on plaider la cause de René Lévesque et de son passif
? Je n'en sais rien. En tout cas, il est clair que l'atmosphère de
méfiance rendait impossible un dialogue politique constructif chez
les « descendants des vaincus ». D'où le délaissement
des enjeux constitutionnels et statutaires, des questions qui
demandaient pourtant qu'on s'y attarde. Plombée par ces carences, à
l'opposé du camp fédéral, qui ne pensait qu'en termes
stratégiques, la direction du PQ ne forma jamais un état-major
politique digne de ce nom. De surcroît, chez les militants, tant
membres que sympathisants, l'absence d'éducation politique de niveau
acceptable vint compléter le portrait. C'est
ce qui résume la vie misérable du PQ depuis cinquante ans.
Réussir partout sauf en politique
Il ne faudrait pas voir dans cette
analyse un dénigrement du Québec et des Québécois. Bien au
contraire. Tous savent que le Québec, fort de son identité
francophone pluri centenaire, s'est distingué depuis la fin des
années cinquante pour atteindre des niveaux d'excellence enviables
dans le domaine des arts – cinéma, musique, théâtre – des
sports, de la science et du monde des affaires. C'est en politique,
domaine réputé pour être particulièrement difficile et ingrat,
que le Québec a déçu toutes les attentes. En cinquante ans, nous
avons réussi partout, sauf en politique ! Un constat qui
s'imposa d'évidence avec la démission de Jacques Parizeau, à un
moment clé d'un rapport de force tendu, certes, comme si la lutte
politique avait le luxe de se payer des vacances. Déclarer si vite
forfait était une capitulation inespérée qu'Ottawa n'attendait
même pas. Chez les partisans, on attendait de Gaulle, on a eu la
Bérézina.
L'histoire nous apprend que, s'agissant
de Lévesque, de Bourassa - et son fameux discours patriotique
répercutant l'échec de l'entente du lac Meech - ou de Parizeau,
effondré, et de tous les autres, le rapport de force, lorsqu'il se
tend, devient vite une charge insoutenable. Or, qui ne s'accroche pas
avec la dernière énergie à se défendre dans les moments
difficiles, quand l'objectif devient plus palpable et concret, met à
risque toutes ses ambitions. Comme le dit si bien l'expression,
l'histoire ne repasse pas les plats. C'est pourtant ce que nous
apprend la légendaire pugnacité des Anglais ! Ou des Juifs ! Comme
l'a si bien rappelé Lionel Groulx dans des pages bien inspirées
dans lesquelles il nous les proposait en exemples.
Une histoire qui trébuche mais
néanmoins inspirante
Notre histoire trébuche. Elle le fait
avec une récurrente et lancinante incapacité d'agir avec fermeté
au-delà du seuil qui met en cause le confort du statu quo.
Nous sommes un peuple qui avait commencé d'atteindre un degré
d'émancipation nationale enviable en 1663, mais sans pouvoir la
consolider suffisamment avant la Conquête. Mais pour bien des
Québécois qui se mêlent de politique, la modification du statut
politique de la nation ne mérite pas une chicane de famille. C'est à
la fois l'expression paradoxale de notre existence nationale et de sa
faiblesse sur le plan politique. Il nous faut mesurer combien il est
difficile de sortir du rang, de s'élever à un niveau jamais
atteint, pour ceux qui n'ont jamais acquis dans leur histoire
nationale, la tradition d'exercer le pouvoir et de le tenir pour leur
propre compte. C'est ce qu'on appelle ailleurs l'État profond, un
État permanent – qui n'a pas que du bon, nous le savons
tous ! - qui assure la continuité en s'affirmant dans
la durée. Ce manque d'atouts peut expliquer, sans toutefois excuser,
tous ces combats abandonnés prématurément, avant leur véritable
dénouement, par une direction politique immanquablement ramollie.
Cela doit bien compter pour une bonne moitié de nos déboires.
Je me
demande où se cache notre meilleure source d'inspiration. Elle se
trouve peut-être dans l'histoire exceptionnellement inspirante de la
Nouvelle-France. Un modèle sans égal dans les annales des
colonisations européennes, comme le rappelle justement Madame
Morot-Sir. Une exemplarité dénigrée à tort
et à travers, et qu'on a même renoncé à transmettre. Serait-ce
parce qu'il s'agit là d'une rare histoire d'alliances réussies et
d'intrépides gagnants ? Plus récemment, elle se trouve aussi cette
inspiration, cet encouragement, dans les éclatants succès que nous
avons connus dans tous les domaines. C'est pourquoi, en dépit de
notre piètre performance en politique, nous ne devrions pas nous
contenter de ce petit pain d'un statu quo constitutionnel qui
nous a été imposé par des autorités étrangères.
Le statut politique du Québec doit
changer ! Et pour le changer nous avons de nombreux défis à
relever. Sans tradition d'autonomie politique et sans enracinement
dans la machine d'État, il
nous faut faire notre glace en patinant, innover, et, surtout,
travailler à briser le funeste réflexe qui nous porte à accrocher
nos patins aux premiers signes de redoux.
Le poids de l'héritage de René
Lévesque
Nous vivons aujourd'hui la continuité
des positions prises à la fin des années 1960 et qui n'ont jamais
évolué depuis. Tous les successeurs de René Lévesque ont repris
son triste héritage sans jamais le remettre en question. La lignée
se voit chez Bernard Landry, poussant Françoise David à fonder
Québec solidaire (FPU) et, à son tour, chez Pauline Marois
incapable de rallier l'indépendantisme de J M Aussant. Combien
de fois Lévesque n'a-t-il pas poussé ses opposants vers la sortie ?
Cette attitude, qui va de pair avec le peu d'importance que l'on
accorde à la cause nationale, a encouragé l'institutionnalisation
du PQ comme simple parti d'alternance provinciale. Les forces se sont
forcément cristallisées, peu à peu, dans une véritable division
nationale des Québécois. C'est à
ces résultats déplorables, c'est à ces fruits indigestes qu'il
nous faut juger de l'arbre péquiste.
Oui, les Québécois ont connu de
belles occasions de se réjouir et de fraterniser en cinquante ans,
dont ces magnifiques fêtes nationales sur le Mont-Royal. Mais pour
ce qui est du fondamental, l'avenir politique du Québec, tout ce qui
a trait au domaine du pouvoir et de nos droits, nous n'aurons connu
que des échecs : le Canada, d'esprit multiculturel et
protestant, sec et dépourvu de magnanimité, ne nous a jamais rien
cédé. Il a même durci et consolidé sa position, resserrant son
emprise sur notre destinée à chaque fois qu'il le pouvait, à
mesure que notre poids démographique déclinait...
Parallèlement, il faut voir cette
chute comme la conséquence de combats si mal planifiés qu'ils ne
pouvaient conduire qu'à la défaite. Avec un bilan aussi
traumatisant, pas étonnant que le Parti québécois veuille parler
de n'importe quoi, sauf de souveraineté, cause pour laquelle sa cote
de crédibilité n'a cessé de fléchir. Pas étonnant non plus que
le discours politique sur notre destin national soit devenu si
rachitique et cynique.
mardi 4 avril 2017
Pour les Nations unies en Afrique francophone
Deuxième
partie
Les
Nations-Unies en Afrique francophone
Après
avoir profité à New York et aux États-Unis pendant 70 ans
Il
ressort de la première partie que l'insularité relative des
États-Unis, une «île» entre deux océans, lui a permis d'entrer
dans la deuxième guerre quand elle l'a bien voulue et de profiter de
cette position de retrait pour parfaire l'édification de son
complexe militaro-industriel. Ce dernier est devenu le fondement de
ce que l'on appelle aujourd'hui «l'État profond». Pour nourrir le
monstre, la guerre sera portée sur tous les continents sans jamais
que les perprétateurs en subissent les terribles conséquences
négatives chez eux.
La
création des Nations-Unies et son installation au cœur même de
l'empire constitue toujours un fleuron de la projection de puissance
américaine. À partir de faits regroupés ici et souvent peu
connus, je vais tenter de montrer que le siège de l'ONU devrait être
délocalisé et ne plus jamais se trouver dans les frontières d'une
grande puissance. Il devrait se situer dans un pays de petite taille,
bien géo-localisé et dont les ambitions ne lui permettraient jamais
d'exercer trop d'influence.
1-
Comment furent choisis New York et les États-Unis
Curieusement,
la première assemblée générale des Nations Unies s'est tenue à
Londres en 1946. À l'ordre du jour, il fallait choisir le pays hôte
de la nouvelle organisation. Selon une note de bas de page de la
chercheuse Jessica
Field,
les autres pays membres du Conseil de sécurité (Royaume Uni,
France, Chine, URSS) auraient été minimalement envisagés, mais vu
«l'urgence», «les destructions de la guerre dans ces pays» et «le
rôle prépondérant joué par les États-Unis pour réunir les
nations et pousser cette forme de collaboration», la préférence
fut donné aux États-Unis. Une parenthèse sur l'urgence : on
pourrait facilement arguer qu'il n'y avait pas d'urgence au temps où
les États-Unis ne défendaient pas leurs alliés... avant d'être
eux-mêmes attaqués par le Japon et que l'Allemagne leur déclare la
guerre. Quoi qu'il en soit, on notera que des trois motifs invoqués
à Londres pour choisir les États-Unis, deux n'existent plus de nos
jours et le troisième est devenu fort discutable.
Une
fois le pays choisi, il fallait choisir la ville. On rapporte que
Londres avait été envisagée antérieurement. Or, avec la
confirmation des États-Unis, la capitale anglaise tomba de fait. Les
villes envisagées restaient San Francisco, Boston, Philadelphie et
New York. Un don de «dernière minute» de 8,5 millions de dollars
de John D. Rockefeller Jr. donna à NY la marge nécessaire pour
l'emporter sur les villes concurrentes. L'argent achète tout! On
rapporte aussi que le miliardaire donna 17 acres de terrain en
bordure de l'East River. Était-ce en échange de contrats
d'architecture et de conception...comme d'autres l'ont rapporté...?
2-
Retombées économiques
Selon
des données de 2014, rendues publiques en décembre 2016, les
Nations unies, ses agences et son personnel ont généré 3,69
milliards de revenus
pour la ville de New York. Ils représentent un apport de 8 000
emplois et amènent à New York 30 000 visiteurs qui participent à
des réunions chaque année. Il s'agit d'une petite avalanche de
dollars US qui retournent à la maison en provenance du monde entier,
année après année.
3-
Langues officielles de L'ONU
A
l'ONU, s'il y a un information confidentielle, c'est qu'il y existe
six langues officielles. Parmi elles, le français et l'anglais sont
les deux langues de travail. À l'ONU, comme au Canada, les langues
officielles finissent en monolinguisme. La langue dominante, que
personne ne veut qualifier de suprême, mais qui exerce néanmoins sa
suprématie, est l'anglais. Christian
Rioux explique,dans
un article paru dans Le Devoir en 2012 «L’Organisation
des Nations unies a depuis sa fondation deux langues de travail qui
ont le même statut officiel : l’anglais et le français. Depuis la
publication du rapport Vareilles en février dernier, on sait
pourtant que, lorsque vient le temps de recruter du personnel,
l’anglais est obligatoire dans 84 % des postes alors que le
français ne l’est que pour 7 %. Et encore, parmi ces rares
employés qui parlent le français, plus d’un sur cinq est affecté
à la traduction.»
Comme
au Canada, la langue de rédaction (et de création) est l'anglais,
ce qui relègue toutes les autres langues à n'être plus que des
langues de traduction.
C'est
un peu comme le cas des Jeux olympiques que l'on peut aussi
reprendre. Fondés par Pierre de Coubertin, cette organisation a le
français pour langue officielle. En pratique, l'anglais y domine
pourtant, sans que les pays francophones réagissent. Le Comité
international olympique siège à Lausanne (Suisse), il y a fort à
parier, et à plus forte raison, que tant que le siège des Nations
Unies se trouvera dans la métropole du monde anglo-saxon, l'anglais
continuera à détemir la prépondérance au prix de la diversité
langagière du monde. Il continuera d'apparaître naturel que son
usage, un fait de dominance auquel trop se sont conformés, continue
de nous rapprocher de son usage exclusif. Le phénomène sera
irréversible si la volonté populaire de donner sa chance à une
autre langue et à un autre pays ne se dresse pas contre une
situation qui a trop durée.
4-
Le déplacement du siège des Nations-Unies dans l'actualité
Une
petite recherche a permis de constater que le sujet de la
relocalisation du siège des Nations unies s'il n'a pas encore
rejoint de larges couches de l'opinion publique, c'est un sujet qui
commence à intéresser. Selon moi, nous n'avons pas fini d'en
entendre parler.
Ainsi,
une question posée sur le site Quora
a généré des réponses intéressantes. Ailleurs on a parlé du
Qatar comme point de chute éventuel, mais c'est de la part des
diplomates et politiques Russes que viennent les prises de position
les plus fortes. La
Russie s'inquiète
des tracasseries que leur impose les services frontaliers ou de
sécurité américains et voudrait que l'organisation s'installe dans
un pays plus neutre. L'argument porte. Difficile à dire s'il s'agit
d'une vraie tendance, mais c'est d'ores et déjà un pays dont on
s'exile (Edward Snowden) et un pays à qui l'on demande de radier sa
nationalité (Ken O'Keefe), ceci sans compter les nouveaux objecteurs
de conscience qui, à tort ou à raison, se croient justifiés de
fuir les États-Unis de Donald Trump. Reste à savoir combien
passeront à l'acte.
D'autre
part, les Russes, pas seuls, trouvent la vie chère à New York.
Qu'en pensent les pays les plus pauvres de la planète comme le Niger
ou l'Éthiopie? Pour réduire le coût des délégations et le temps
de transport, Un
parlementaire russe
s'est exprimé pour que les Nations Unies s'installent au centre de
toutes les capitales du monde. D'abord dubitatif, j'ai dû jongler un
peu avec l'idée avant de comprendre qu'il propose très
objectivement l'endroit qui serait le plus proche en kilomètres
cumulés des 183 capitales. Par exemple, si 100 capitales se trouvent
à moins de 4 500 km d'une ville candidate, (Alexandrie? Latakié?
Limasol?) ce serait déjà pas mal, mais pas du tout le cas de New
York, qui serait sous cet angle exclue au premier tour. Dans un
article du NY Daily
News,
à propos d'un livre paru en 2013, on trouve là aussi que la
métropole américaine est trop couteuse et on propose la ville de
Nairobi au Kenya. Washington se trouve à 327 KM de New York, la
seule capitale située à proximité du siège de l'ONU. Il s'agit
d'un immense avantage pour faire entendre son point de vue, jouer de
son influence et pratiquer toutes le formes de lobbying. Rockfeller
avait bien vu l'intérêt d'installer l'ONU à New York!
5-
Un choix pour la francophonie et un choix pour le bien vivre chez soi
planétaire
Les
Nations Unies sont le fruit d'un projet discuté par Churchill et
Roosevelt en 1941 au large de Terre-Neuve, puis à la Conférence
Arcadia, tenue fin 41 et au début de 1942 à Washington. Cette
conférence ratifia la Déclaration des nations unies sans
majuscules. Installer l'ONU à New York, comme je l'ai montré, et de
l'aveu même des décideurs, a été un choix hâtif, dicté par les
circonstances du moment. Or, si ce choix a pu s'imposer à la fin de
la guerre, il n'est plus justifié aujourd'hui. Nous sommes désormais
en présence d'un attribut de la domination américaine et
anglo-saxonne du monde de l'après-guerre, en présence d'un choix
qui avait tout du transitoire mais qui s'est incrusté dans le temps
alors que le monde a changé. Les décisions prises dans «l'urgence»
et dans l'état de délabrement matériel du monde à l'époque sont
devenues caduques.
En
dépit de contestations mal fondées au sein même des États-Unis,
il faut admettre que l'ONU a fait de New York une plaque tournante de
la diplomatie internationale. La présence onusienne a grandement
contribué au rayonnement de cette métropole, mais aussi, on ne peut
l'oublier, à la valorisation et à la projection de l'anglais et de
la culture anglo-saxonne à travers le monde.
Dans
ce sens, compte tenu de la faveur que gagne l'idée de multipolarité
du monde et d'un partage plus équitable des avantages économiques,
il faut considérer la rente que procure automatiquement à tout pays
le privilège d'être celui où siège les Nations unies. Il faut
désormais considérer l'emplacement newyorkais du siège des nations
unies comme une réalité dont la révision s'impose. Il n'est pas
trop tôt, après 72 ans à enrichir New York, de formuler un projet
de relocalisation ordonné et réfléchi de l'ONU dans un pays plus
approprié, moins riche, d'ici 10, 15 ou 20 ans. Les jeux olympiques
se déplacent. Sans être aussi mobile, pourquoi pas l'ONU?
J'ai
déjà pour ma part proposé une ville du Québec. Or, le Québec est
trop proche de New York et il a sur ce coup le désavantage de se
trouver en Amérique. Pour le Québec, fragile et en voie de
dépopulation autochtone, accueillir l'ONU serait d'ailleurs un
facteur additionnel d'anglicisation et d'assimilation. D'ailleurs,
honnêtement, l'ONU ne pourrait se relocaliser en Amérique du Nord.
Par conséquent, mon choix se porterait volontiers sur un pays
francophone d'Afrique, autre qu'une capitale, une ville qui pourrait
bénéficier à son tour des retombées économiques conséquentes
et, par effet de proximité, alléger le fardeau économique des
délégations africaines à l'ONU.
En
situant ce phare de la diplomatie mondiale au centre de croissance
démographique de la francophonie, le rayonnement du français dans
le monde s'en trouverait impulsé. Comme on l'a vu, d'autres pays et
d'autres intérêts s'intéressent au sujet et proposent leur choix.
Le Québec et la francophonie ne doivent pas être en reste.
L'ONU
en Afrique, quelle belle façon de déplacer des rentes américaines
vers l'Afrique, de garder les Africains chez eux par la création
d'un nouveau pôle économique assorti de bons emplois, sans faire la
charité!
En
terminant, on a certes critiqué l'impuissance des Nations unies à
souhait et souvent on le fait avec raison. Effectivement, il faut le
reconnaître, la réforme des Nations unies ne concerne pas que la
langue et le site de son siège. Beaucoup d'autres propositions de
réforme d'inégale valeur circulent depuis un certain temps, mais
cela évolue hélas très lentement. Les Nations unies malgré leur
imperfection, qui ne sont pas sans rapport avec l'influence
américaine de proximité (pour ne pas dire de promiscuité ),
constituent un forum des pays, le seul, et sauvegardent a
minima
un droit international fort malmené il est vrai, mais auquel il nous
faut tenir et tâcher de le renforcer en attendant mieux.
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